Logiques du Bateau ivre

par Steve MURPHY

pour Maria Luisa Premuda Perosa 1

Dans la «Préface » de son recueil Les Poèmes de la Mer , Joseph Autran, «que Rimbaud cite dans sa lettre du 15 mai 1871, en tête d’une série dénommée «les morts et les imbéciles » » 2 , écrivait ces lignes d’une modestie qui sent moins les embruns que la captatio benevolentiae :

Il ne me reste qu’à invoquer sur cette nouvelle tentative l’indulgence déjà éprouvée du public. Quelque jour, peut-être, une oeuvre plus grande et mieux achevée, un livre vraiment digne de s’intituler Le Poème de la Mer

lui sera offert par un heureux et un plus habile. J’applaudis d’avance au chef-d’oeuvre futur, au majestueux vaisseau qui pourcourra les Océans et résistera fièrement aux assauts des vents contraires.

Rimbaud, lui, ne se contente pas d’être un «habile » : «En attendant, demandons aux poètes du nouveau , – idées et formes. Tous les habiles croiraient bientôt avoir satisfait à cette demande. – Ce n’est pas cela ! » (lettre du 15 mai 1871). Il se peut qu’avec Le Bateau ivre – son propre «Poème/ De la Mer » (selon la formule en abyme des v. 21-22) – il ait décidé de relever le défi, ce «nouveau » intellectuel, cognitif, formel apportant une réponse au voeu terminal du Voyage baudelairien («trouver