LE SILPHIUM ÉTAT DE LA QUESTION"
L'histoire du silphium ', retracée dans de nombreuses publications depuis le début du XIXe siècle2, peut être résumée ici brièvement, comme simple préambule à l'exposé des aspects controversés de la question.
Quand les colons théréens s'installèrent en Libye, où ils devaient fonder Cyrène en 63 1 a. G, ils y découvrirent une plante étrangère au monde égéen, qu'ils appelèrent oi?uj)iov en se bornant à helléniser le vocable indigène correspondant. C'était une plante du type de la férule commune, autrement dit une Ombellifère, dont toutes les parties renfermaient un suc fortement aromatique qui se coagulait en une masse résineuse, après incision de la racine ou de la tige. Il est probable que les Libyens autochtones utilisaient ce produit depuis la nuit des temps pour soigner toutes sortes de maux. Sitôt connu des médecins grecs, le « suc de Cyrénaïque » (cmoç K\)pr|vaÏKOç) devint une panacée, aussi coûteuse que recherchée, de sorte que
Cet article est la version développée d'une communication présentée à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres le 2 avril 2004, sous le patronage de M. Paul Bernard. Je remercie vivement MM. Jean Leclant et Jean Marcadé d'en avoir accepté la publication dans le Journal des Savants, dont le format permet une illustration adaptée au sujet.
1. Orthographe adoptée par le Trésor de la Langue française, s.v. (t. 1 5, 1992), avec mention de la variante « silphion ». On trouvera dans le présent article la forme « silphium », qui peut être considérée comme intégrée dans notre langue (présente au Dictionnaire de l'Académie française depuis 1878), hormis les citations, pour lesquelles la graphie du texte original sera conservée.
2. La première en date est celle de J.P. THRIGL, Res Cyrenensium, Hafniae, 1828 (réimpr. Verbania, 1940), la plus détaillée (avec des longueurs et des inexactitudes), celle de A. Macl, « Les voyageurs modernes dans la Cyrénaïque et le silphium des Anciens », RA, 14, 1857, p. 143-160, 227-237, 338-354. Tout l'essentiel est dit dans le chapitre « Du silphion » de F. Chamoux, Cyrène sous la monarchie des Battiades, Paris, 1952, p. 246-263 (cité désormais Cyrène ), complété et mis à jour par deux articles du même auteur, « Le problème du silphion », Bull. Soc. Antiquaires de France, 1985, p. 54-60, et « Du silphion », dans Cyrenaica m Antiquity, éd. G. Barker et alii, Oxford, 1985, p. 165-172.